EMDR : Une thérapie pour retrouver le chemin de l’apaisement
Dernière mise à jour : 12 déc. 2020
Paris Match | Publié le 14/10/2019 à 03h00

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On la présente comme la techniques la plus efficace contre le syndrome de stress post-traumatique, les angoisses, les phobies et les peurs… Comment cela fonctionne-t-il et que faut-il savoir avant de se lancer ? Explications.
EMDR : soigner avec les yeux.
Comment réapprendre à vivre lorsque l’on a subi un traumatisme qui paralyse et hante… L’EMDR (pour « eye movement desensitization and reprocessing ») est réputé pour guérir les stress post-traumatiques. Aujourd’hui, on l’emploie aussi pour traiter des angoisses plus légères, des problèmes d’estime de soi... La méthode fut découverte en 1987 par la thérapeute comportementale américaine Francine Shapiro alors qu’elle était assise sur un banc et regardait le ballet des oiseaux, leurs allers et retours : ses yeux balayaient l’horizon de gauche à droite et son angoisse s’apaisait. Un déclic.
Six années plus tard, le psychiatre David Servan-Schreiber introduisit l’EMDR en France. On l’utilise pour les rescapés d’attentats ou de tremblements de terre. Pas besoin de longues années de thérapie… Là, il suffit de quelques séances. Mais la méthode bouscule, heurte et fait violence. « Elle fait revivre le souvenir de ce traumatisme. On utilise les mouvements oculaires – le patient suit des yeux le doigt du thérapeute –, les tapotis sur les genoux ou des “bips” dans les oreilles pour ranger les souvenirs. Il y a huit phases de traitement, la partie des mouvements des yeux est l’une d’entre elles. La préparation est essentielle pour mettre en sécurité et protéger le patient », explique Martin Teboul, ex-président de l’Association EMDR France. Sur le papier, la méthode paraît miraculeuse, les traumatismes s’envoleraient « en un clin d’œil ».
"Lorsque j’ai à nouveau déroulé le fil de l’agression, cela ne m’a rien fait. C’était comme si j’avais une barrière de protection".
Mais certains hésitent avant de se lancer. C’était le cas d’Eléonore. « Au début j’étais perplexe », confie la jeune femme agressée par un déséquilibré, qui l’a poignardée à quatre reprises, au bras et à la jambe. « Le syndrome de stress post-traumatique est apparu plusieurs semaines plus tard, lorsque mes blessures physiques ont été guéries. C’est à ce moment-là que j’ai sombré », explique-t-elle. Elle ne dort plus, est angoissée, n’arrive plus à prendre les transports en commun, et, surtout, les flashs de l’agression reviennent sans cesse. Elle consulte, débute une analyse, essaie l’hypnose, les antidépresseurs… Puis elle expérimente l’EMDR avec le psychiatre Christophe Fauré. « Je l’ai d’abord vu plusieurs fois avant de faire ma première expérience d’EMDR. Pendant la séance, j’ai redéroulé chaque seconde avec les yeux fermés en tapotant sur mes genoux. Je suis ressortie épuisée, effondrée, je ne pouvais plus marcher. La deuxième séance fut aussi très douloureuse. Et, pendant la troisième, lorsque j’ai à nouveau déroulé le fil de l’agression, cela ne m’a rien fait. C’était comme si j’avais une barrière de protection », raconte Eléonore. Depuis, elle reprend le métro, réussit à nouveau à dormir et peut évoquer son agression sans que cela la fasse replonger.
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L’EMDR « désensibilise les émotions » en régulant l’amygdale qui se situe dans le cerveau. « Le cerveau classe les informations mais, en cas de traumatisme, les émotions prennent le dessus. L’EMDR fait revivre ce souvenir au cerveau et lui donne la capacité de le ranger comme un souvenir passé », explique Martin Teboul.